24 mai 2010

SOUVENIRS

Parce que ce soir tu me manques plus que les autres soirs;
Parce  que ce soir je me rapelle ce que les autres n'ont pas voulu voir;
Parce que ce soir j'en crève de ton absence
et de ces images de souffrances,
ces images de salles d'attentes où le temps s'éternise;
ces images ou je te vois dans l'entrebaillement d'une porte
en train de te faire examiner, piquer, torturer;
en train de t'entendre m'appeler, pleurer ta peur et ta douleur.
Parce que ce soir je me rappelle tes yeux dans lequel je voyais que tu ne voulais pas mourir, que tu voulais encore te battre
et puis je me rappelle tes yeux lorsque je n'y voyais plus que du renoncement et la fatigue de vivre, de subir.
je me rapelle ce masque de plastique intégral qui t'attachait la tête à cette table de radiothérapie et cette porte de 50 cm qui se referme sur cette pièce où tu es tout seul.
je me rapelle les réponses de la radiothérapeutes qui minimisait mon discours lorsque je disais qu'après chaque séance tu étais de moins en moins bien ; tu faisais de plus en plus de crises d'épilepsies, ton oedème au cerveau prenait de plus en plus d'ampleur et la tension dans ton petit crâne devenait insuportable... la maladie de Fanconi qui n'était pas encore connue faisais des siennes ! et on ne m'écoutait pas !!!
je me rapelle lorsque tu n'as plus été le même petit a petit engorgé par la cortisone qui t'avait grossi le visage, mis de la moustache et des sourcils épais,
je me rappelle lorsque tu n'as plus commencé à y voir : tu ne voyais plus qu'un quart de ton hamburger !
je me rapelle lorsque tu as été de plus en plus paralysé, que tu ne pouvais plus te couper le repas.
je me rapelle tes yeux lorsque je t'ai dit que tu ne pouvais plus monter à l'échelle de ton petit lit et qu'il fallait échanger avec celui de ton petit frère.
je me rappelle lorsque tu ne pouvais plus tenir ta tête pour ton dernier Noël et que tu nous voyais déballer tes cadeaux (de misérables petites peluches que tu n'as pas pu tenir, pour dire qu'on t'offrait quelque chose, un Noël qui ne voulair rien dire !
je me rapelle ta peur lorsque tu ne me reconnaissais plus
et que tu appelais ton papa Monsieur.....
............
et tant d'autre moment de souffrances dont les pires ont étés à l'hopital.

je me souviens ton corps froid dans cette morgue impersonnelle et ce tiroir dans lequels ils te mettaient sans prendre la peine de cacher le sac.
pendant les trois jours qui ont suivis ton décés, il te rentraient et te sortaient de cette chambre froide dans des postures idiotes dans lesquelles tu te figeait.

Je me rapelle ........... parce que tout le monde veut l'oublier et ne pas voir à quel point tu as été courageux dans ce silence terrible dans lequel certains aiment à te maintenir. Ce soir j'ai envie de crier cette année 2006 parce que c'est aussi ça ta vie, ce n'est pas un conte de fées où l'on idéalise ta vie de petit garçon et ta maladie, ta fin de vie, ta mort.

C'est aussi ça être une maman endeuillée, une maman qui pète un peu les plombs.
Ce soir j'arrête de sourire, de cacher ma peine et mon envie de parler de toi et de tout ça comme si ce n'étais pas tabou, non politiquement correct.

Ce soir je pleure...
 Tu es mon héros, mon guerrier des lumières et tu me manques tellement!!!